Culture

La Cache – Prix Fémina 2015

6 juillet 2016

Premier roman du journaliste Christophe Boltanski

 

La Cache est un magnifique premier livre distingué en 2015 par le prix Fémina, un grand reportage passionnant sur une étrange tribu française. Christophe Boltanski, fils du sociologue Luc Boltanski, neveu de l’artiste Christian Boltanski et du linguiste Jean-Elie Boltanski signe ici son premier roman.

La Cache, l’histoire d’une famille

L’histoire de 3 générations qui ont vécu, ensemble, fusionnelles, dans un appartement rue de Grenelle à Paris… C’est un vrai roman, mais aussi l’histoire vraie de cette famille étonnante. Dès la première page et tout au long de l’histoire, des croquis des pièces de l’hôtel particulier, rue de Grenelle, ponctuent la construction narrative du livre.

La grand-mère paternelle, figure centrale de La Cache

Abandonnée par sa famille, adoptée par une riche veuve catholique, elle est handicapée par la polio. Elle écrit des romans, elle est communiste et héritière. Elle est le pivot d’une étrange histoire d’amour familial, immense et névrotique, étouffante et dans le même temps d’une liberté absolue. Venant d’une famille anti-républicaine et traditionaliste, elle méprise ce milieu qu’elle juge hypocrite car il se cache derrière un paravent vertueux :
« Le mauvais Français, c’est toujours l’autre ».

Le grand-père, médecin d’origine juive, sensible et émotif, s’est converti au catholicisme car il avait une soif inépuisable d’intégration. Lui qui vivait dans l’idéal du mythe républicain, lui le symbole d’une intégration réussie par l’école est contraint, sous l’occupation, de porter l’étoile jaune puis de fuir la déportation. L’appartement dispose d’un réduit où il se cache et vit en clandestin pendant 20 mois, jusqu’à la libération de Paris.

La « patte » du grand reporter

Christophe Boltanski, fait le portrait de sa tribu avec les méthodes du journaliste : il interroge son père, le sociologue Luc Boltanski, son oncle Christian, grand nom de l’art contemporain. Il gratte ses souvenirs d’enfance, cherche des traces des aïeux de son père à Odessa.
On reconnait la patte du grand reporter. Il échappe au pathos, au récit larmoyant, s’attache à raconter les faits, garde la bonne distance, dedans et dehors à la fois. Le résultat est très réussi. Il fait de l’histoire de cette famille tellement particulière, marquée par la seconde guerre mondiale, meurtrie par l’occupation, l’histoire d’une famille française.

Il se joue des paradoxes des Boltanski. Juifs et catholiques, intellectuels et déscolarisés, bourgeois et révoltés, riches et chiches, sédentaires et voyageurs. L’humour est partout. Ils vivent dans leur voiture quand ils se risquent à l’extérieur ; ils ne mangent rien par crainte de prendre des kilos et de dépenser de l’argent ; ils ne se lavent pas, les enfants ne vont pas à l’école, ils ne reçoivent personne, ils voyagent au bout du monde, ils vendent l’Huma.

Mais par-dessus tout, dans cette famille, il y a de l’amour, un immense amour dans un climat de liberté et de créativité extraordinaires.

BOLTANSKI Christophe, La Cache, août 2015, éditions Stock, 344 pages, 20€

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